L'avenir (el moustakabal)

2014 / video/  3:58 min

 

Dans la vidéo « Moustaqbel », 2014, l’artiste Gouri Mounir superpose le mot « avenir » écrit dans la langue arabe littéral à sa représentation métaphorique et mentale telles que perçues dans l’imaginaire de la société Algérienne. En effet, les difficultés sociales et économiques rendent la possibilité de se projeter dans le futur une entreprise semée d’incertitude et d’obstacles infranchissables, un mur, une impasse.

 

Cet obstacle est à la fois source de désir et de frustration, des pulsions de vie vouées à l’échec. C’est aussi la convoitise de tout un chacun qui aspire à des lendemains meilleurs et sereins.

L’esthétique de la calligraphie du mot « Moustaqbel », trône sur un mur sur lequel, des corps se projettent dans un élan avorté qui dévoile un manque de conviction synonyme d’une sorte de relâchement et de fatigue. La quête est d’abord individuelle en premier temps avant qu’elle soit collective dans une mise en scène où l’on voit autant de corps, se ruaient sur une surface rigide, donnant à saisir un acte désespéré, une situation d’urgence, un geste ultime, une fuite mais vers quoi au juste ?

Le jeu performatif des acteurs, très surréaliste, frôle un peu le burlesque mais ne trahie en rien la réalité de la situation économique et sociopolitique car la nonchalance des corps des femmes tout autant que celle des hommes laisse entrevoir des masses corporelles déjà vidés de toute substance, de toute vitalité avant même d’essayer à se mesurer à cette entreprise : affronter l’obstacle. Car en effet, c’est de cela qu’il s’agit et même plus, pousser le mur en béton, le faire reculer.

L’artiste qui a lui même inscrit le mot « Moustaqbel » sur le mur, revient vers la fin de la vidéo pour « taguer » ou déposer un point d’interrogation avant de se positionner devant la camera et fixer l’objectif. L’image qui en résulte, pousse le spectateur à prendre conscience de sa présence comme observateur passif d’une situation. Par ce geste l’artiste Gouri Mounir, déplace le discours et le retourne vers cet autre, cet observateur qui à son tour est observé. Cependant cette lucarne d’où il a été possible d’assister au déroulement de l’acte performance, nous rappelle qu’effectivement, ces individus se trouvent dans un espace intérieur, un espace peut-être carcérale.

Nadia Seboussi, 2015.